Véritables anges gardiens des domaines skiables, les pisteurs secouristes sécurisent les pistes et interviennent en cas d’accident. En France, ils sont chaque hiver près de 2.500 à intervenir sans relâche depuis l’aube jusqu’à la tombée de la nuit. Ils réalisent chaque année plus de 40.000 interventions. Un métier largement squatté par la gente masculine mais dans lequel quelques femmes se sont taillé une belle réputation. Direction la Rosière en Haute-Tarentaise pour aller à la rencontre de Muriel Wetzel… Une femme pisteur…
Muriel – Qu’est ce qui t’a donné envie de faire ce métier ?
Tout simplement l’amour de la montagne et du ski. Bordelaise de naissance, je suis arrivée en Savoie il y a une vingtaine d’années dans le cadre d’une formation pour enseigner le sport dans les écoles. Depuis, j’ai changé d’orientation, je me suis installée et ai fondée une famille. J’ai 46 ans et deux enfants qui sont eux aussi passionnés de montagne. Aucun regret !
Comment devient-on pisteur ?
Il faut être en possession du diplôme de secours premier degré et en équipe, l’équivalent de celui des pompiers, afin de pouvoir se présenter au test technique de ski. Celui-ci comporte plusieurs épreuves : descente de piste noire, ski libre et ski hors piste toute neige. Il faut au minimum avoir sa Flèche de Vermeil. Après le test technique, la formation a proprement parlé compte deux sessions. La première dure une semaine. On y apprend le béaba du milieu montagnard. En cas de succès, en route pour la deuxième session de trois semaines à l’ENSA, l’Ecole Nationale de Ski et d’Alpinisme, située à Chamonix. Là il s’agit d’apprendre tout se qui touche au secours sur les pistes et l’intervention auprès des blessés. A ceci s’ajoute un stage de météorologie et de nivologie (étude du terrain, de la neige). En général il y a 200 candidats et seulement 25 retenus…
En quoi consiste exactement ton travail ?
Le pisteur doit ouvrir le domaine skiable, c’est à dire s’assurer chaque jour de l’ouverture et fermeture des pistes, mettre en place la signalétique afin d’assurer un maximum de sécurité pour les skieurs.
A tour de rôle un pisteur est en poste afin d’intervenir pour les secours. Les blessés sont alors descendus en traîneau au cabinet médical ou en hélico vers un hôpital. Etant également pisteur 2ème degré je suis formée pour intervenir sur des secours en crevasse et travailler sur des glaciers. J’ai aussi le titre d’artificier. Je dois donc assurer la sécurité du domaine skiable par mauvais temps. Pour éviter que les skieurs ne déclenchent des avalanches, nous (par équipe de deux) les déclenchons volontairement à l’aide de dynamite.
Etre une femme dans ce milieu c’est plutôt inhabituel, ça se passe comment ?
Les débuts n’ont pas été faciles. Grâce à mon fort caractère et ma détermination à ne pas me laisser faire je me suis accrochée et j’ai résistée. Il y a 16 ans, je faisais partie des premières femmes à exercer ce métier. J’ai débuté à Sainte Foy en Tarentaise parmi une équipe très sympa qui m’a bien accueillie. Cette expérience positive m’a permis de poursuivre et persévérer. Mais cela reste un milieu macho. Les hommes ont parfois du mal à accepter qu’une femme soit capable de faire le même métier et à part égale, surtout un job qui requiert une certaine force physique. Heureusement la situation change grâce au caractère volontaire de certaines femmes qui ont su s’imposer dans le milieu même si parfois elles ont dû faire deux fois plus leurs preuves que les hommes. Les mentalités évoluent. Il y a environ une femme pisteur pour dix hommes. Sur la Rosière je suis la seule et ça ne vous étonnera peut-être pas, de l’autre côté du col, à la Thuile en Italie, il n’y en a aucune !
As-tu été confronté à des moments difficiles ?
Malheureusement oui. Il m’est arrivé à plusieurs reprises d’intervenir sur des secours graves, notamment des arrêts cardiaques. Dans certains cas, nous n’arrivons pas à ranimer la personne. C’est très difficile à accepter, on aimerait tant que ça termine bien. Ces leçons de vie nous apprennent à rester calme, à être solidaire et surtout faire preuve d’humilité en toute circonstance.
Une anecdote peut-être ?
A mes débuts à la Rosière, un jour à la fermeture des pistes je redescends tranquillement quand j’entends crier. Normalement j’étais censé être la seule encore sur les pistes. Ne voyant personne, j’ai levé les yeux et j’ai aperçu un skieur sur le télésiège qui était à l’arrêt…Le perchman était évidemment déjà parti ! Sans GSM, il était là pour un bon moment ! Finalement tout s’est bien terminé, nous sommes devenus des amis et il m’appelle son Saint Bernard !
Quels sont pour toi les points forts de la Rosière ?
C’est un domaine très ensoleillé situé à 1850 mètres qui jouit d’un panorama d’exception sur le Mont Blanc et les grandes Jorasses. Nous avons la chance d’être en liaison directe avec la station de la Thuile en Italie. La station évolue bien ces dernières années et reste avant tout une station familiale. Cela fait plus de 15 ans que j’y suis !
C’est un job physique et parfois très difficile, qu’est ce qui te motive à continuer?
L’amour de la montagne en premier. Ensuite, on est constamment en contact avec la clientèle. Etre à l’écoute de l’autre permet de conserver nos qualités humaines et nos valeurs et de les mettre en pratique quotidiennement. Les jours ne se ressemblent absolument pas, jamais ! La météo est tout sauf monotone ! Il y a toujours quelque chose à faire, on n’a pas le temps de s’ennuyer. Etre pisteur me permet aussi de rester en forme, dans le dynamisme et la bonne humeur, cela me ressemble beaucoup en fait. Tant que la santé me le permet et que j’ai la flamme….je continue !
Informations sur la Rosière: www.larosiere.net